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vendredi 12 mars 2010

Quelle réforme pour la fiscalité ?

Dans mes billets de février qui traitaient, l'un des retraites et l'autre de l'assurance maladie, j'ai expliqué pourquoi selon moi ce qu'on appelle les "cotisations sociales" ne sont en fait que des taxes déguisées, raison pour laquelle, je le répète, le financement des organismes sociaux devrait moins hypocritement être assuré par l'impôt, en cessant de ponctionner les seuls revenus liés au travail, c'est à dire en alourdissant le coût de la main d'oeuvre, exagérément élevé dans ce pays.

Aujoud'hui, je voudrais m'attaquer au coeur du problème du financement des politiques publiques, à savoir la fiscalité de manière globale.

Tout confondu, le total des prélèvements obligatoires représente bon an mal an un plus de 50 % du Produit Intérieur Brut, c'est à dire du total de la richesse produite dans l'hexagone. Ce qui signifie en passant qu'en moyenne les Français travaillent au moins six mois par an pour la collectivité...

J'ai bien dit "en moyenne" ! Car les disparités sont énormes en fonction d'une multitude de critères. Ce patchwork de régimes différents, de niches fiscales, d'exonérations diverses et variées, et à l'inverse de surtaxes, centimes additionnels et autres barême progressif ou quotient familial, est le résultat d'un historique chaotique au cours duquel, toutes couleurs politiques confondues, les gouvernements successifs ont tenté, dans leur logique interventionniste chronique, de pallier ces fameuses inégalités tant haïes et fustigées de toutes parts. Avec, bien entendu, des conceptions très souvent différentes de la notion même d'inégalités.

En tout état de cause, à force de vouloir se mêler de tout, tout réglementer, tout régimenter, tout réguler, intervenir à tort et à travers sur tous les processus, l'Etat ou ses succédanés en sont arrivés à organiser un chaos indescriptible où plus rien ne va, ou plus rien ne fonctionne correctement, où une grande majorité des citoyens se plaint de la mauvaise qualité de leur administration et de la dureté de leur propre existence, où le contribuable est pressuré pour tenter de financer ces prodiges d'efforts inutiles, où, je l'ai dit, la Nation travaille six mois de l'année pour l'Etat, où malgré cela la dette publique abyssale condamne plusieurs générations de nos descendants à l'esclavage économique et financier, où le travail ne rapporte plus à personne de quoi vivre décemment, où le coût de ce même travail entraîne les entreprises dans des délocalisations dont on se demande bien pourquoi elles ne sont pas encore plus nombreuses, où il revient moins cher d'importer des fruits ou des légumes depuis l'autre bout du monde que de les acheter à nos producteurs locaux qui, pourtant, sont sous le seuil de pauvreté, où, pour résumer le tout, à force de vouloir tout arranger on ne fait que tout démolir...

Car les choses sont naturellement tellement plus simples que ça ! Naturellement, et ce depuis des millénaires, les humains se sont organisés sur cette terre de la manière la plus simple et la plus intelligente que la Création, ou la Providence, ou encore la simple Nature, au choix des croyances de chacun, ait engendrée sur cette planète. Cette manière-là, ce fut à l'origine le troc, puis, après l'invention des monnaies d'échange, le commerce. Pour se procurer les produits dont il a besoin pour sa subsistance et/ou pour satisfaire ses envies, l'Homme a compris très rapidement que le moyen le plus éfficace était d'échanger son travail contre les produits en question. Echange travail contre nourriture, échange travail contre marchandises, échange travail contre confort. Echange travail contre tout ce qui est disponible, naturellement ou, justement, par le fruit dudit travail...

Seulement voilà ! La cupidité de certains, alliée aux aléas de la vie humaine, et à ceux de la nature environnante, font que tout n'est pas si simple, et qu'il est nécessaire d'établir des règles pour que ces échanges puissent se réaliser dans des conditions optimales. Et si l'on édicte des règles, il faut veiller à ce qu'elles soient respectées. Sinon, on en arrive très rapidement à un immense désordre où ne peuvent plus se réaliser ni la liberté d'action ni la sécurité auxquelles chaque individu a un droit naturel et inaliénable. Et ce rôle de "gendarme" est celui de l'Etat. C'est même sont seul rôle légitime. Et dans une société complexe comme l'est celle que l'Homme a su mettre sur pieds, ce rôle a un coût économique. C'est là la seule raison d'être de l'impôt, qui devrait, dans un monde idéal, servir à cela et uniquement à celà.

Au lieu de ça, au fil des siècles, et singulièrement dans les deux qui viennent de s'écouler, un certain nombre d'individus se sont mis en tête de demander à l'Etat de remplir un tout autre rôle : celui d'un Père Protecteur Tout Puissant supposé pallier tous les aléas de l'existence, supposé même pallier les manquements individuels au plus élémentaire principe de responsabilité dont la charge repose sur tout être vivant vis à vis de lui-même d'abord, vis à vis de ceux dont il a la charge ensuite. De fil en aiguille, on en est arrivé à une société dans laquelle cette notion de responsabilité au quotidien s'est liquifiée au point de considérer que c'est à l'Etat de prendre en charge tous les dommages, grands ou petits, subis par les citoyens. Sans considération du fait que chacun, pour être libre, ne peut qu'être responsable de ses actes. Les deux notions sont pourtant indissociables l'une de l'autre. Mais si la notion de "droits" est élevée de nos jours au rang du sacré, celle de "devoirs" est quasiment entrée en désuétude. Et c'est semble-t-il à l'Etat que reviendrait, d'après l'idée la plus répandue, la charge d'en supporter les conséquences. Le résultat est mathématique : le coût des interventions indues de la puissance publique, allié à la gabegie inévitable qu'engendre la gestion d'une telle entreprise, est tout simplement insupportable, à tel point que la pression fiscale asphyxie inexorablement l'économie.

Je ne mésestime pas les autres facteurs de dysfonctionnement de cette économie, à commencer par les agissements malhonnêtes de certains, mais, je le répète, le contrôle de l'observation des règles établies (la Loi) est du ressort de cet Etat qui, englué dans le fatras de ses prérogatives artificielles, n'a plus le temps ni l'argent pour remplir cette mission régalienne qui est pourtant la seule qui lui soit légitime.

Parallèlement à ce constat, il convient d'en faire un autre non moins alarmant : celui de la mauvaise répartition de la charge fiscale. J'ai déjà parlé de l'absurdité de faire reposer la charge de certains financements sur le seul coût du travail, et je n'y reviens donc pas. Il n'est pas moins absurde de (tenter de) faire reposer la plus grande partie de l'impôt sur les plus gros revenus. Je sais que je suis ici en train de bousculer un dogme, et pour certains une évidence. Je vais pourtant essayer de démontrer que le système de l'impôt progressif est une hérésie en même temps qu'une injustice insupportable.

Tout d'abord, la logique de l'impôt progressif, dont la philosophie est celle qui consiste à dire "celui qui gagne plus paie plus", a son corollaire tout à fait naturel et pour certains là encore tout à fait évident, à savoir "celui qui gagne peu ne paie rien du tout". Les deux sont absurdes. La logique froide qui devrait animer tous les raisonnements en la matière, et qui seule est compatible avec une réelle égalité des citoyens devant l'impôt, conduit à s'apercevoir que tout citoyen, quel que soit son niveau de revenus, doit participer à l'effort de financement du fonctionnement de l'Etat (ce mot pris au sens large, c'est à dire y compris les collectivités territoriales), et doit le faire en fonction de ses revenus. Que celui qui gagne très peu ne paie rien fait de lui un priviligié au sens propre du terme, et que celui qui gagne beaucoup paie beaucoup plus que la moyenne fait de lui une "vache à lait" et accessoirement une victime de son propre succès.

De quel droit décide-t-on que les bas revenus sont si mérités qu'on se refuse à y toucher, et qu'à l'opposé les hauts revenus sont si immérités qu'il est normal d'en subtiliser une grande proportion ? Ca porte un nom : c'est de la spoliation. Et c'est très exactement le contraire de la justice et de l'équité ! D'ailleurs, les intéressés ne s'y trompent pas, et ceux d'entre eux qui en ont le loisir ne se gênent pas pour aller générer leurs revenus ailleurs, et payer leurs impôts ailleurs, là où on les vole un peu moins. Et ils ont bien raison...

Voilà pour l'injustice. Mais ça ne s'arrête pas là : c'est totalement improductif. Dans la pratique, on s'aperçoit que moins de la moitié des Français sont assujettis à l'impôt sur le revenu, par le jeu cumulé des franchises d'un côté, et des crédits d'impôt et autres dégrèvements de l'autre. De fait, la très grosse majorité de l'impôt est payé par ceux qui ont des revenus moyens, c'est à dire cette catégorie de citoyens qu'on appelle pour cette raison les "classes moyennes". Les autres, soit ne gagnent pas assez pour être imposables, soit ont de larges possibilités de profiter de "niches fiscales" diverses et variées dont sont exclues de facto les "classes moyennes" dont on parle, à cause de la taille des investissements nécessaires pour en profiter. Où est donc la justice là-dedans ? Surtout quand on sait que la majorité de ceux qui bénéficient des largesses de l'Etat-Providence sont justement ceux qui ne paient pas l'impôt ?

La solution à ce grand bazar ? Elle est à la fois simple et compliquée, mais totalement réalisable et tout à fait logique :

1) Il faut que l'Etat cesse de s'occuper de ce qui ne le regarde pas, et laisse aux citoyens la liberté mais aussi la responsabilité de ce qui est naturellement de leur ressort. Les seuls domaines naturels d'intervention de la puissance publique sont ses obligations de garantir la liberté et la sécurité des citoyens.

Ca inclue, strictement :

  • Le fonctionnement des instances législatives
  • La police
  • La justice
  • L'armée
  • La diplomatie
Tout le reste n'a pas vocation à être financé par la collectivité de manière autoritaire ni obligatoire. Il y a cependant deux domaines qu'il semble bien difficile de laisser totalement à la chagre des individus :

  • La santé, mais pour le seul "gros risque", comme j'ai pu l'expliquer dans mon billet qui lui était consacré. Cela inclut le risque "vieillesse", comme j'ai pu également en parler.
  • L'éducation. Pour ce dernier poste, le problème est d'ailleurs moins une question de coût qu'une question de socle minimal de connaissances à garantir à chacun. Il reste qu'il est totalement anormal de centraliser au sein d'une administration tentaculaire la charge de cette éducation. Plus efficacement, la méthode du "chèque éducation" pratiqué dans certains pays, avec le libre choix de l'établissement pour les parents d'élèves, semble mieux adaptée à la tâche, et singulièrement à la résolution des problèmes rencontrés aujourd'hui. Ici comme ailleurs, la concurrence entre des établissements privés d'enseignement serait à coup sûr plus efficace que le magma illisible de l'EN actuelle...
2) Parallèlement, il faut bien entendu que l'Etat cesse de faire payer au citoyen le reste de ses interventions qui auront disparu, y compris celles qualifiées à tort de "prestations sociales", qui ne sont qu'un assistanat institutionnalisé qu'il convient évidemment de faire cesser, du RSA aux allocations familiales en passant par toutes les mânes dont bénéficient à profusion essentiellement ceux qui trouvent là un bon moyen de s'exonérer des efforts que l'on est en droit d'attendre de tout citoyen responsable de lui-même, et donc réellement libre.

En rendant ainsi aux citoyens la part de leurs revenus dont on les déleste aujourd'hui autoritairement en pure perte, on leur redonnera du même coup les moyens d'assumer par eux-mêmes, et dans la seule mesure dont ils décideront souverainement, les dépenses qu'ils jugeront opportunes de leur propre point de vue.

3) Il ne restera donc plus à l'Etat qu'à financer ses seuls domaines d'intervention définis ci-dessus, au moyen d'un impôt juste et équitable, à savoir un impôt proportionnel appliqué aux revenus de tous, du plus pauvre au plus riche, en un taux unique.

Reste un problème à résoudre : celui que j'appellerai des "laissés pour compte" de la société. Une société du type de celle que je viens de décrire laisse à l'Homme l'intégralité de son libre-arbitre et de sa liberté d'Homme. Corollairement, elle lui laisse aussi sont entière responsabilité dans la conduite de son existence. Jusqu'ici, rien d'anormal ni de choquant pour qui a une haute idée de l'Homme, justement. Et de ses droits naturels et inaliénables. Cependant, il n'est pas d'exemple, même théorique, d'une société (qu'elle soit libre ou qu'elle ne le soit pas, du reste) dans laquelle aucun individu ne risque de se retrouver en situation d'échec, que ce soit par sa faute ou par un fait de force majeure.

Dans une société aussi développée, avec le niveau de technologie et la qualité de vie dont nous sommes capables, il est tout à fait inacceptable d'imaginer que cette société-là laisse sans aucun secours un tel accidenté de la Vie sans réagir. Mais corollairement, dès qu'on met en place un système d'aide comme ceux que nous connaissons à profusion aujourd'hui, on constate à quel point d'aucuns en abusent, et à quel point ce système est à la fois coûteux et à la fois injuste puisque par définition à la charge de ceux qui n'en bénéficient pas et, surtout, qui n'en abusent pas.

C'est pourquoi je pense, avec d'autres, qu'une bonne solution consisterait à instituer un "Revenu Minimum Universel". De quoi s'agit-il ? On détermine un revenu minimum strictement suffisant pour survivre (se nourrir, se mettre à l'abri, se vêtir). C'est à dire, pour faire court, le minimum nécessaire pour éviter l'état de SDF. Et ce RMU, financé par l'impôt proportionnel dont je viens de parler, on le verse à tout le monde. J'ai bien "tout le monde", du plus pauvre au plus riche. Du chômeur au milliardaire.

Ainsi, tout citoyen est à l'abri de la catastrophe sociale, mais parallèlement, d'une part les abus sont par nature impossibles puisque tout le monde en bénéficie, et d'autre part ceux qui n'en ont pas vraiment besoin sont automatiquement ceux qui le financent le plus...

Voilà, j'ai été particulièrement long et je m'en excuse, mais le sujet est vaste. Je résumerai simplement en trois lignes le projet que je défends :

  • Limiter le rôle de l'Etat à ses fonctions régaliennes naturelles, et laisser ainsi aux citoyens le fruit de leur activité.
  • Limiter l'aide sociale au versement à tout citoyen d'un revenu minimum permettant de survivre
  • Limiter les prélèvements obligatoires à un impôt juste calculé en proportion stricte du revenu de chacun
L'égalité devant l'impôt est sans aucun doute une des plus importantes à garantir aux citoyens, mais n'oublions jamais que "L'égalité est un droit, mais aucune puissance humaine ne saurait la convertir en fait" (Honoré de Balzac). Cependant, ce n'est assurément pas en instituant son contraire qu'on a la moindre chance d'y parvenir...

4 commentaires:

  1. et vous avez calculé le coût du RMU en question ?

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  2. Je n'ai évidemment pas les éléments pour le faire ! Mais ça n'a quasiment pas d'importance, puisque, par définition, il est prélevé sur l'impôt et systématiquement redistribué. C'est donc une "opération blanche" pour les comptes publics.

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  3. Jacques Marseille en parle depuis longtemps...

    http://www.jacquesmarseille.fr/Ouvrages/Argent_des_francais/Chap_32.asp

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  4. Cet ouvrage de Jacques Marseille est une démonstration magistrale, et chiffrée qui plus est.
    C'est peut-être parce qu'il était capable d'une telle limpidité dans ses démonstrations qu'il était tant critiqué par les tenants des systèmes actuels, dont l'opacité leur permet de faire accroire à leur bienfondé.
    Quand on analyse sérieusement les chiffres, l'absurdité du statu quo est évidente...

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